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L’ŒUVRE DE RICHARD WAGNER À PARIS.

exemple, Gabriello Krauss. Aussi Éva Dufrane, qui justement avait suppléé cette noble tragédienne dans la plupart de ses rôles, se montra-t-elle, dans celui-ci, toute à son honneur. Je citerai encore l’adresse de Mme Deschamps-Jehin, et surtout l’âpreté nerveuse et sonore de Mme Chrétien-Vaguet, que l’on avait eu tort de faire d’abord paraître en Elsa, et dont toutes les qualités s’accordaient, au contraire, au profit d’Ortrude.

Les trois premiers personnages du drame ont bénéficié de quelques interprètes remarquables. Ce sont des rôles si heureusement conçus, qu’ils mettent aisément en lumière les vraies qualités d’un artiste, et les font d’autant plus valoir qu’il est plus sincère La principale difficulté à vaincre, — il en est d’ailleurs de même pour tous les drames de Wagner, et l’on s’étonne que les directeurs ne le comprennent pas mieux, — c’est que les qualités diverses des interprètes soient harmonieuses entre elles, et qu’un même esprit les guide. N’est-ce pas, au fond, tout le secret des exécutions de Bayreuth, et par quoi, avec, souvent, de bien moindres beautés vocales ou scéniques, elles donnaient des impressions sans analogue ailleurs ?

Je rappellerai surtout, sous l’armure d’argent de Lohengrin : Verguet, qui avait une voix de charme et de style, d’un timbre excellent dans les ensembles ; Alvarez, auquel la conviction surtout faisait défaut, mais qui ne manquait pas d’ampleur ; Jean de Reszke, dont l’élégance et la diction étaient incontestablement séduisantes, mais d’un homme et d’un amoureux plus que d’un héros mystique ; Scaramberg, dont la simplicité et l’émotion s’efforçaient au contraire, avec goût, d’évoquer cette impression surhumaine ; Franz, aux notes chaudes et vibrantes… Van Dyck