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qu’il en avait assez dit. Il ne tenta plus de renouer la conversation et se refusa à répondre aux questions que Philip lui posait. Par contre, il imprimait à la course une allure telle que chiens et gens en seraient sûrement éreintés avant la nuit.

Philip n’ignorait pas que, dans la tête de Blake, brûlait une pensée ardente et redoutable. Cette hâte même d’arriver au but était singulièrement suspecte. À trois heures de l’après-midi, trente-cinq milles environ avaient été parcourus depuis le départ. Le Barren était morne et sans vie aucune.

Entre trois et quatre heures, les sapins reparurent à droite et à gauche du fleuve. Bientôt ils devinrent plus pressés et pareils aux murs noirs d’une véritable forêt. Philip veilla à ce que le traîneau se maintînt au milieu du fleuve, dont la largeur nue et glacée était une protection contre toute embûche. Deux cents yards séparaient d’ordinaire une rive de l’autre et, souvent, cette distance était double. Un coup de fusil pouvait seul être à redouter. Qu’il atteignît ou non son but, Blake serait sur-le-champ abattu.

Comme le crépuscule gris de la nuit arctique commençait à les envelopper, Philip sentit se marquer la fatigue de cette course effrénée. Ses jambes étaient lasses. Sur le traîneau, Célie immobile, des crampes dans tous les membres,