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s’éteindre dans le ciel du Sud. Puis les ténèbres s’étendirent rapidement. C’était l’heure où se réveillait son désir farouche de liberté. Nuit après nuit, il rongeait la chaîne d’acier. Nuit après nuit, il avait regardé la lune et les étoiles, et, tandis que le grand danois dormait allongé tout de son long, interrogé l’air pour y saisir l’appel de Louve Grise.

Le froid, cette nuit-là, était plus vif que de coutume, et la morsure aiguë et glacée du vent de l’est agitait Kazan étrangement. Il lui allumait dans le sang ce que les Indiens appellent la « frénésie du froid ». Les nuits léthargiques de l’été s’en étaient allées et le temps se rapprochait des chasses enivrantes, interminables. Kazan rêvait de bondir en liberté, de courir jusqu’à épuisement, avec Louve Grise à son côté.

Il fut en proie, toute la nuit, à une agitation extraordinaire. Il se disait que Loue Grise l’attendait et il n’arrêtait pas de tirer sur sa chaîne, en poussant des gémissements plaintifs. Une fois, il entendit au loin un cri qu’il imagina être celui de sa compagne. Il y répondît si bruyamment que Paul Weyman en fut tiré de son profond sommeil.

Comme l’aube était proche, le professeur se vêtit et sortit de la cabane. Il remarqua aussitôt la froideur de l′air. Il mouilla ses doigts et les éleva au-dessus de sa tête. Par le côté des doigts qui s’était aussitôt séché, il constata que le vent était remonté au nord. Il se mît à rire sous cape et, allant vers Kazan :

— Ce froid, mon vieux ! va détruire les dernières mouches. Dans quelques jours, nous serons partis. La pirogue qui nous emmènera doit être en route…

Au cours de la journée, Paul Weyman envoya son domestique à Red Gold City, pour quelques emplettes, et il l’autorisa à ne rentrer que le lendemain matin. Lui-même s’occupa à faire ses préparatifs de