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Pour préciser d’abord jusqu’à quel point les rayons X se montrent dépourvus d’électrisation[1], nous employions une enceinte de Faraday en plomb épais de forme cubique, ayant 23 cm de côté, reliée à un électromètre à quadrants de Curie. Un large faisceau de rayons X y pénétrait par une ouverture circulaire de 10 cm de diamètre, placée à 7 cm seulement de la lame focus du tube producteur de rayons X.

L’enceinte de plomb, y compris son ouverture, était complètement enveloppée par une couche continue d’un diélectrique solide (paraffine ou ébonite), recouverte elle-même d’une enveloppe d’aluminium mince en communication avec la terre. L’enveloppe continue de diélectrique solide est nécessaire pour maintenir l’isolement parfait du cylindre qui, sans cette précaution, ne demeurerait pas isolé dans l’air ambiant rendu conducteur de l’électricité par l’action des rayons de Röntgen.

Dans ces conditions, l’électromètre ne se chargeait pas sensiblement. Nous avons pu ainsi conclure qu’en admettant l’hypothèse de rayons X électrisés, le courant, équivalent à la circulation de l’électricité dans le faisceau large et intense de rayons X employé, était certainement inférieur à 10-12 ampère.

Nous avons pu, au contraire, conclure à l’électrisation négative des rayons secondaires des métaux lourds. À la pression atmosphérique, les rayons X et les rayons secondaires communiquent à l’air une conductibilité telle que le métal rayonnant n’est plus isolé ; il est alors impossible de recueillir l’électricité des rayons secondaires. Il fallait éviter en même temps que les rayons secondaires des métaux lourds, souvent très peu pénétrants, ne fussent absorbés au voisinage immédiat du métal qui les émet. Nous avons été ainsi amenés à placer les métaux dans l’air raréfié et à opérer

  1. Le professeur E. Dorn a annoncé que les rayons secondaires des métaux lourds sont déviés par le champ magnétique et dans le même sens que les rayons cathodiques (Abhand. d. Naturf. Gesell. zu Halle, Bd. XXII, 1900, p. 40-42).

    L’un de nous avait antérieurement émis l’opinion que les rayons secondaires très absorbables des métaux lourds peuvent renfermer des rayons analogues à ceux de Lenard et déviables comme eux par l’aimant [G. Sagnac, Recherches sur les transformations des rayons de Röntgen, Chap. I, § 3 : Rayons secondaires, rayons X et rayons de Lenard ( L’Éclairage électrique du 12 mars 1898)].