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contre ce bagne, la solidarité entre ouvriers et intellectuels encore s’affirme.

En Espagne, ces jours derniers, un professeur, membre du Parti communiste, m’a dit comment à Oviedo, dans le cachot où lui et d’héroïques mineurs de l’Octobre asturien se trouvaient incarcérés, ils réussirent à publier un journal. Et dans la prison de Madrid, où j’ai pu lui parler au travers des barreaux, Largo Caballero, le leader du Parti socialiste espagnol, et d’autres détenus, militants de base et théoriciens, m’ont dit comment ils avaient réussi à organiser une université ouvrière.

Avec quelle force, avec quel éclat péremptoire, ces magnifiques exemples, cette faim de savoir, ce besoin de collaborer pour apprendre, toujours apprendre, ces élans s’opposent à l’obscurantisme, au gâchis des valeurs, à la négation des forces vives, dont la réaction et ses agents prétendent faire une loi.

Mais notre solidarité, camarades, il ne faut pas qu’elle s’affirme seulement dans les bagnes, dans les camps de concentration.

Travailleurs manuels et intellectuels, communistes, socialistes, inorganisés, contre la répression en France, contre les assassinats d’ouvriers, contre le fascisme d’Union nationale, contre le gouvernement de trêve, contre les Jeunesses patriotes, les Briscards, les Croix de Feu, les godelureaux francistes et autres asticots de la décomposition bourgeoise, nous devons nous ranger sur un même front, sans cesser jamais de travailler à l’unité des forces antifascistes, unité qui peut, seule, permettre la déroute définitive des bandes d’exploiteurs et de massacreurs dont les bottes martèlent les pavés ensanglantés du capitalisme.

Et si, camarades, le triomphe du socialisme en U. R. S. S. nous est une raison chaque jour plus péremptoire de dire et de redire l’admirable mot d’ordre : « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! », les dangers qui menacent la culture dans la société capitaliste pourrissante nous décident aujourd’hui à crier :

Intellectuels de tous les pays, unissez-vous aux prolétaires de tous les pays.

René CREVEL.