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nous y trouvons, cependant, au point de vue de l’âme suédoise, une analogie cachée.

Tout à l’heure les paysans, songeant avec angoisse à leur pays lointain, regrettaient le calme et l’uniformité des jours. Mais tout à coup, un élan de tout leur être leur montre qu’il est « enivrant » d’avoir quitté cette uniformité, fût-ce pour le danger et la douleur.

Dans Gösta Berling, Lilliécrona, calme et heureux dans sa tranquille maisonnette, n’y peut rester et s’enfuit un matin, parce que « son esprit a besoin de rumeurs, d’amertume et de richesse, de la diversité magnifique de la vie. »

Et sans doute Lilliécrona fuit vers les plaisirs, tandis que les Dalécarliens vont vers un héroïque sacrifice. Mais les uns, comme l’autre, cèdent à cette inquiétude qui trouble secrètement le Suédois dans la monotonie de sa vie trop réglée : Ce désir de changements soudains, de passions fortes, ce rêve éternel, cette flamme intérieure, qui fait que, dans son calme apparent, il reste un poète, un ascète, un fou ou un saint, jamais un bourgeois satisfait. Avec de telles âmes, on ne peut affirmer que le cadre de la vie, si solide qu’il paraisse, ne sera pas brisé d’un élan brusque, si une pensée, une aspiration nouvelle surgit tout à coup du fond de l’être. Et cela crée une parenté, qui n’est pas unique, entre l’âme suédoise et l’âme slave.