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mais il désirait en même temps lui faire une sorte de restitution, non certes par principe, ni par respect pour aucune loi, humaine ou divine, mais pour calmer le trouble de son âme superstitieuse. Et dans ce sens, il ne pouvait rien faire ouvertement sans implicitement reconnaître la dette tacite. Le seul moyen de sortir de cet embarras se trouvait dans la disposition de sa fortune après sa mort. Mais, tout en souffrant de quelque chose qui ressemblait beaucoup à du remords, il haïssait trop cordialement Jonah Wood pour insérer son nom dans son testament. Il n’y avait donc qu’à laisser l’argent à George. Un legs de cent mille dollars lui avait semblé suffisant pour recouvrer la paix de l’esprit, et, une fois cet arrangement pris, il n’y avait plus songé.

Mais pendant cette maladie, qu’il croyait être la dernière, un nouveau courant de pensées lui avait fait envisager les choses différemment. Aussi méfiant que rusé, l’extrême sollicitude manifestée par sa sœur avait attiré son attention. Ils avaient toujours vécu en excellents termes, et il n’était pas étonnant qu’elle se montrât affectueuse pour son frère et lui donnât ses soins ; il était même de son devoir de rester à son chevet au moment du danger et de presser les docteurs de questions. Mais Tom avait cru remarquer que dans son attitude et dans sa voix il y avait quelque chose de faux, de forcé, de « pas naturel », qu’il ne pouvait pas bien définir, mais qui réveillait en lui toutes les forces de résistance qui l’avaient rendu célèbre pendant sa vie. Sa maladie offrait cette particularité que ses facultés mentales étaient restées absolument intactes et se trouvaient même pour ainsi dire affinées par ses souffrances physiques et son inquiétude sur son état. Le doute sur