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M.  George Wood et encore moins de s’ériger en juge de ses pensées, et pourtant elle était enchantée d’avoir parlé comme elle l’avait fait. Ce jeune homme avait de très justes motifs de ressentiment, contre Thomas Craik ; mais il y avait dans sa satisfaction évidente à la perspective de la mort du vieillard quelque chose qui révoltait ses sentiments les plus délicats, et elle n’avait pu s’empêcher de le lui dire. Elle ne croyait assurément pas que sa mission fût de réformer George Wood, de lui rendre les vertues religieuses de la foi, de l’espérance et de la charité ; mais il était certain, en tout cas, qu’elle prenait un incontestable intérêt à sa conduite et à ses actions, ce qui, vu le peu qu’elle connaissait de lui, l’étonnait grandement. Si elle eût été plus âgée, moins religieuse, et moins ignorante de ses propres instincts, elle se fût demandé si elle ne commençait pas déjà à aimer George plus que la rectitude irréprochable de ses sentiments moraux. Mais chez elle, la religiosité de la jeune fille avait tellement pris le dessus, qu’elle attribuait son inquiétude au doute sur sa propre conduite plutôt qu’à un secret attrait commençant déjà à faire sentir son influença.

Il était à prévoir que Constance n’aimerait pas facilement, l’amour le plus innocent du monde trouve souvent une barrière dans cette espèce de sentimentalité religieuse qui la dominait, car les scrupules morbides ont le pouvoir de détruire toutes les spontanéités, entre autres l’amour, qui est la première ou qui devrait l’être. Constance ne ressemblait pas à sa sœur Grâce qui avait aimé John Bond quand ils étaient encore tous deux des enfants et qui avait l’intention de l’épouser le plus tôt possible. Son tempérament plus froid perdait son temps à faire des calculs au lieu de jouir du