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sez rare depuis quelque temps. Le vieillard l’avait à plusieurs reprises observé pendant leur repas, mais n’avait rien dit de l’air soucieux et défait qu’il remarquait sur le visage de son fils. Il était près de dix heures lorsque Jonah Wood posa son livre et leva la tête.

« Qu’as-tu, George ? » demanda son père. George leva les yeux sur la lampe pendant quelques secondes. Il ne se souciait pas plus de la sympathie de son père que de celle d’aucun autre, mais en pensant qu’il lui serait impossible de dissimuler pendant longtemps son agitation et sa mauvaise humeur, dont son père devait supporter les conséquences, il jugea qu’il valait mieux parler.

« Ma santé est bonne, répondit-il, mais j’ai peur d’être une mauvaise compagnie pendant quelques jours. Mlle  Fearing a refusé tantôt de m’épouser. Je l’aimais. Voilà ce qu’il y a, père. »

Jonah Wood décroisa ses jambes, puis les recroisa du côté opposé, ce qui était son habitude quand il était extrêmement surpris. Machinalement, il reprit son livre et finalement répondit d’une voix faible :

« Je suis fâché de ce que tu m’apprends là, George. Je pensais que c’était une bonne fille. Mais t’en voilà bien revenu. Je n’ai jamais eu bonne opinion des femmes en général, excepté de ta pauvre chère mère. »

Ce fut toute la consolation que George trouva auprès de son père, mais il le connaissait trop bien pour supposer que le vieillard prononcerait des paroles de condoléances, quoi qu’il pût ressentir. Il était du reste parfaitement évident qu’il éprouvait quelque chose, car bien qu’il tînt consciencieusement son livre devant ses yeux pendant