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SOUVENIRS

pour dissimuler la vérité sur l’origine de cette blessure.

Roberspierre le jeune se jetz par une fenêtre et se fendit la tête sur le pavé de la place de Grève. Lebas, qui voulut résister, fut tué par, un jeune homme de seize ans dont il avait fait guillotiner la mère et le frère aîné. On enleva cet affreux Couthon qui était cul-de-jatte et perclus, et qui s’était fait porter dans le fond d’une garde-robe ; enfin l’on découvrit l’infâme Henriot qui s’était caché dans l’égout de l’arcade Saint-Jean dont on fut l’arracher avec des crocs et des crampons de fer : quelle scène infernale !

Je ne sais comment il se fit qu’avant de les conduire au tribunal revolutionnaire, où les attendait Fouquier-Tinville, afin de les expédier à l’échafaud, on les fit entrer dans le château des Tuileries, et justement dans l’appartement de la Reine, où siégeait le comité de salut public ! On y jeta Roberspierre sur le milieu d’une grande table où il avait souscrit tant d’arrêts sanguinaires, et presque tous les conventionnels y vinrent à la file pour l’accabler d’injures et d’exécrations. Il n’avait obtenu, pour couvrir sa plaie, qu’un lambeau d’écharpe tricolore, et pour essuyer le sang et la sanie qui découlaient de sa bouche, il n’avait autre chose que des feuilles de papier qui se trouvaient à sa portée et qui étaient peut-être des sentences de mort écrites par lui ?

Il y eut un vieux homme en habit de gendarme, qui dit avec une voix lugubre en étendant la main sur cette horrible tête : c’est vrai qu’il existe un être supême ! et René Dupont vous dira que tous les au-