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SOUVENIRS

disposition que cent vingt-cinq mille livres, mais j’écrivis en deux mots a la Princesse de Talmont qui demeurait dans la rue du Gindre, au coin de la rue du Pot-de-Fer et qui s’appelait la citoyenne Trotin. (J’avais si bien mis ceci dans ma tête que je l’y retrouve encore). Mme de Talmont me répondit que j’aurais bien pu disposer de ses petits pois sans le lui dire, et que j’étais devenue ridiculement cérémonieuse : en conséquence de quoi je fis sortir cent mille écus à Mme de Talmont, de la cachette du Grand-Vicaire ; j’y fis ajouter cent mille livres de mon argent, et l’on fut avertir Mme de Janson que la somme était à ses ordres, mais qu’elle eût à s’ingénier pour la faire transporter au lieu de sa destination, car l’Abbé de Dampierre et Dupont, mon factotum, ne savaient absolument comment sortir d’un pareil embarras. Celui-ci calculait avec raison que s’il ne pouvait se faire aider pour la translation de ce monceau d’or, ce ne serait pas l’affaire d’une journée. Le volume de ces quatre cent mille livres équivalait, disait-il, à celui d’une grosse citrouille.

La Marquise de Janson me fit demander quelques jours de répit, et nous apprîmes alors en quoi consistait sa négociation, ce qui nous remplit d’attendrissement et d’admiration pour elle. Chabot, député de Loir-et-Cher et capucin défroqué, avait été pressenti sur l’exécution de ce projet, moyennant la promesse d’un million qu’il aurait mission de partager, comme il entendrait, avec le concierge Richard et deux inspecteurs des prisons, qui s’appelaient Jobert et Michonit. Mme de Janson demandait une permission pour entrer à la Conciergerie