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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

solennelemt longues et trop protectrices, et qui condamne à mort en faisant un plat calembourg, et disant : — « Oui, citoyens !, je demande l’exécution la plus prompte, et je vote pour la mort dans une seconde, parce que je m’appelle Seconde. »

Entendez-vous le Duc d’Orléans qui vote la mort du Roi, et parce que le Roi mérite la mort, ose-t-il dire, et ne voyez-vous pas la main de Dieu qui commence à s’appesantir sur lui ? Il avait compté sur une sorte de confraternité dans le crime, et voilà Manuel, un autre régicide, qui fait tomber sur lui ces paroles de sinistre, augure : — « Nous sommes des législateurs et non pas des juges. Si la Convention nationale était un tribunal, on n’aurait pas eu la surprise d’y voir siéger le plus proche parent de Louis XVI, qui n’a pas eu, sinon la conscience, au moins la pudeur de se récuser… » – Sur la première, question, dit le représentant Duprat, je dirai oui avec d’autant plus de confiance que d’Orléans a dit non. – Il ne nous reste que le choix des maux, reprend Caton Salles ; mais heureusement que Louis Capet nous laisse de tous ses parens celui qui peut le mieux, dégoûter de la royauté ! – En votant la mort de Louis, s’écrie Barbaroux, je m’apprête à voter la mise en jugement d’un autre Bourbon…

Ô profondeur de l’éternelle justice ! n’admirez-vous pas le regret honteux de ce d’Orléans ! son accablement, sa terreur, quand il entend ce pronostic funeste avec ces cris dérisoires et cette rumeur de mépris ! Voyez donc ce fléau qu’on assomme et ce monstre dont l’enfer se moque !