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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

ment pas son habitude autrement que dans un pareil état de crise. Mme de St.-Julien fondit en larmes et fit des sauts de carpe, avec des cris de chouette, et la Mise Lecamus qui ne s’endormit pas, resta comme une bûche, à peu près dans son état naturel.

Le procédé du magnétiseur ne me sembla pas précisément scandaleux, comme on le prétendait ; mais il me parut tout-à-fait dépourvu de bienséance. Il était assis devant ces dames, ses pieds touchant les leurs ; ses regards enfoncés dans leurs yeux, en serrant fortement leurs genoux entre les siens ; il leur tenait les mains appliquées dans les siennes, au grand ouvertes, avec les quatre pouces et les doigts majeurs en correspondance immédiate, à dessein d’influer sur le battement des artères à l’unisson : c’est la raison qu’il en donnait, et voilà ce qu’on appelle se mettre en rapport. Ensuite le magnétiseur promena doucement ses mains, à partie de la tête aux pieds, sur toutes les parties du corps de ces dames, en ayant soin de s’arrêter pendant la valeur d’une minute à chaque articulation des membres, et lorsque le sujet magnétisé fut supposé par lui devoir être suffisamment pénétré de fluide, il administra ce qui s’appelle le magnétisme à grands courans, ce qui consiste dans un mouvement à distance opéré largement avec les deux mains ouvertes et les doigts écartés, laquelle action est dirigée de la tête aux pieds avec la plus grande accélération. Ceci produisit un même effet sur ces trois personnes, dont les visages devinrent absolument décolorés, et qui prièrent le magnétiseur de s’arrêter parce que la plante des pieds leur brûlait. M. de la Gorce ajouta