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SOUVENIRS

sion claustrale et de chasteté perpétuelle, à l’abbaye de Panthemont, le samedi 14 mars.

— On aurait cru que vous pouviez la faire recevoir et la garder avec vous dans votre chapitre, lui dit insidieusement et malicieusement la Présidente Hocquart. (Notez que c’était dans la soirée du 13 au 14 mars, à l’hôtel de Beauvau.) — Madame, elle a malheureusement deux quartiers de robe du côté de sa mère, lui repartit aigrement la Coadjutrice ; sa noblesse n’est plus chapitrale, et d’ailleurs elle est trop romanesque et trop inexpérimentée pour que je me charge de sa direction. (— C’est-à-dire qu’elle est trop jeune et trop jolie pour que vous souffriez qu’elle reste auprès de vous, pensa charitablement la Présidente.) La Marquise de Boufflers lui dit ensuite avec son air distrait et désintéressé que c’était véritablement un meurtre, et qu’elle aurait dû marier sa nièce avec son cousin, le petit de Gondrecourt. Mme de Rupelmonde ne répondit pas. On a prétendu qu’elle avait rougi, mais il était malaisé de s’en apercevoir. Autant vaudrait nous dire qu’on ait vu rougir une brique rouge, une figure en terre cuite, ou, si l’on veut, une roue de carrosse, à travers une couche du plus épais vermillon.

Tout de suite après qu’elle fut partie, Mme de Craon se prit à dire à voix basse et d’un ton mortifié : — J’ai peur que la Coadjutrice ne soit une méchante femme. — Ma sœur ! elle a toujours passé pour un diable incarné, lui répondit le Maréchal de Beauvau ; d’où vint que la Princesse de Craon fut encouragée par cette réplique de son beau-frère, et