Page:Créquy - Souvenirs, tome 3.djvu/101

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
97
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

échafaudage élevé dans le port de Marseille, afin d’y voir lancer à la mer un vaisseau de l’amirauté ; il venait d’avancer la main pour soutenir ce jeune garçon qui marchait pour s’en aller, en riant aux anges, et qui venait de trébucher sur les bords de l’échafaud. — Grand merci, Monsieur, lui dit ce petit crêté, et d’autant, plus que je suis la seule personne de qualité que vous en ayez fait descendre.

— Holà ho ! mon beau page sans barbe, lui dit la terrible Éminence, êtes-vous encore ou déjà Connétable de Lesdiguières pour être si haut à la main vis-à-vis d’un prêtre ?

— J’ai là vos deux cousins de La Porte, qui sont mes pages, et je ne le suis de personne, lui répliqua l’autre ; mais voici mon oncle l’Archevêque, qui vous répondra pour le mieux. — J’y vais, j’y vais, cria-t-il à son gouverneur. — C’était M. le Cardinal avec qui j’étais en civilités sur le fait des gentilshommes et des échafauds.

— Bien lui valut de n’être qu’un écolier, disait Mme de Coulanges, et sa pauvre mère en frémissait encore au bout de quarante ans, après la mort du Cardinal.

L’autre histoire de Mme de Coulanges était que la Reine Anne d’Autriche parlait un jour de tout ce qu’elle avait souffert pendant sa première grossesse, c’est-à-dire celle de Louis XIV, qui n’avait, disait-elle, fait autre chose que de la trépigner comme un enragé. — Il est fils du Roi Louis XIII, se prit à dire M. de Poix ; il avait de qui tenir pour donner des coups de pieds dans le ventre à sa mère…