Page:Créquy - Souvenirs, tome 2.djvu/40

Cette page a été validée par deux contributeurs.
36
SOUVENIRS

mères à faire entrer dans l’éducation des jeunes seigneurs de mon temps l’exercice des révérences au plié (comme pour nous autres), et c’était en expectative et prévision plus ou moins fondée pour l’obtention du collier de l’ordre. On maintenait les garçons en jaquette longue aussi long-temps qu’on pouvait, souvent jusqu’à l’âge de 13 ou 14 ans ; c’était suivant l’ennui qu’ils en prenaient et les persécutions qui s’en suivaient de leur part ; mais jusqu’à ce qu’ils fussent habillés en hommes, ils ne saluaient jamais qu’au plié comme de petites filles.

Il est résulté de l’information, que le Comte de Horn avait confié pour quatre vingt-huit mille livres d’actions de la banque à cet usurier (dont le vrai nom n’a seulement pas été légalement reconnu), lequel usurier lui voulait nier le dépôt, et s’était brutalement emporté contre son noble et fier créancier jusqu’à l’avoir frappé sur le visage. La scène avait eu lieu dans une salle d’auberge où le Comte venait d’entrer pour y chercher cet agioteur ; et c’était là, que transporté de colère, il avait saisi sur la table un couteau de cuisine, dont il avait fait à cet homme une assez légère blessure à l’épaule. Un Piémontais nommé le Chevalier de Milhe, et frère d’un Écuyer de la Princesse de Carignan avait achevé ce juif à coups de poignard, après laquelle expédition il s’était emparé de son portefeuille, dont il avait inutilement prié le Comte de Horn de vouloir bien se charger, pour aller s’en partager le contenu, au prorata de ce que l’usurier pouvait leur devoir à l’un et l’autre en conséquence de ses filouteries. Voilà toute l’affaire, ainsi qu’il est prouvé