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SOUVENIRS

grande maison du Marais, mais personne ne le voyait, parce qu’il était d’une sauvagerie et d’une bizarrerie singulières. On racontait sur lui des choses étranges, et l’on disait notamment que, s’il ne sortait jamais de son hôtel, c’était à raison d’une lettre de cachet. On ajoutait que, s’il avait le malheur de sortir, on le remettrait à la Bastille, où il avait déjà passé plusieurs années, et l’on prétendait que le Lieutenant de Police entretenait chez lui deux ou trois surveillans… Les ministres et les magistrats faisaient toujours la sourde oreille et ne se laissaient jamais entamer sur le chapitre de ce Vidame, qui était pour les gens du monde à peu près comme la Supérieure des Carmélites ou (sans comparaison) comme le bourreau, qu’on sait exister, mais que les gens du monde n’ont jamais vu. (Pendant que j’y pense, et de peur de l’oublier, laissez-moi vous faire une parenthèse au sujet du bourreau de Paris, ainsi qu’à l’occasion de cet étrange Vidame dont je n’aurai peut-être jamais celle de vous reparler.) Le charitable Abbé Cochin, Curé de Saint-Jacques-du-Haut-Pas, et fondateur de l’hospice qui porte son nom, était certainement un personnage de la véracité la plus parfaite. Dans sa jeunesse, en hiver, un jour qu’il sortait à cinq heures du matin de chez son père, qui était un vieux Conseiller d’état, domicilié dans le Marais, il voulut traverser la place de Grève, dont il trouva

    royal de l’Aigle blanc de Pologne, etc., mort à Paris le 22 avril 1770. Sa branche était l’aînée de celle du Marquis de Lusignan d’aujourd’hui.

    (Note de l’Auteur.)