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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

re, qui était morte long-temps avant ma naissance ; il m’en accorda la survivance, et je me trouvai casée dans son cerveau centenaire avec douze ou quinze ans de plus. Il était continuellement préoccupé, depuis son arrivée, de Mme la Duchesse d’Angoulême, qu’il voulait aller visiter à son couvent du Val-de-Grace, et qui gisait depuis trois ou quatre ans dans une chapelle sépulcrale de cette abbaye. On lui répondait tristement qu’elle était morte en 1715 ; il s’en affligeait tout le reste du jour, mais il ne s’en souvenait plus après son réveil du lendemain, ce qui lui causait une désolation quotidienne et nous faisait éprouver une contrariété journalière. Il avait toujours été l’ami de cette Duchesse, et l’on voyait à sa manière d’en parler que le sentiment qu’il avait eu pour elle était celui d’une vénération profonde. Je vous dirai que son mari le Duc d’Angoulême (Charles de Valois, Comte d’Auvergne et de Ponthieu), était fils naturel de Charles IX et de Marie Touchet, et qu’étant veuf de Charlotte de Montmorency, fille ainée du duc Henry Ier, il avait épousé en l’année 1644 (à l’âge de 72 ans), Françoise de Nargonne-Mareuil qui mourut 69 ans après son mari, et laquelle Duchesse d’Angoulême avait été la contemporaine et l’intime amie de mon grand oncle. Comme elle a vécu cent trente-neuf ans après le Roi son beau-père et que j’aurais pu voir la belle-fille de Charles IX, puisque j’avais de 13 à 14 ans lorsqu’elle est morte, j’ai pensé qu’il ne serait pas sans curiosité ni sans intérêt pour mon petit-fils de lui consigner sous les yeux une pareille singularité chronologique.

Quand le Grand-Prieur était mis sur le chapitre