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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

bord sur les terres de Naples, au pas de ses chevaux, escorté par ses gentilshommes et sa livrée, comme aussi par tous les sujets du Roi qui se trouvaient dans l’État romain ; mais la Duchesse et la Marquise de Créquy restèrent, avec seulement une vingtaine de domestiques, dans Rome et dans leur palais Farnèse, dont on ouvrit, pour lors, toutes les grilles et toutes les portes majeures ; avec un air de fière indifférence et de sécurité méprisante ; parce que le représentant, ou pour mieux dire l’envoyé du Roi très-chrétien ne s’y trouvait plus[1].

L’inflexible et résolu Pontife en fut atterré. Le gouvernement romain en était paralysé de terreur. Le Duc de Créquy ne voulut écouter aucune explication, recevoir aucune excuse ; aucune satisfaction personnelle.

Certains détails de cette étrange affaire n’ont pas

  1. Je ne puis jamais laisser dire qu’un Ambassadeur soit le représentant du Souverain qui l’accrédite, à moins que ce ne soit par hyperbole emphatique et manière de parler. Un Ambassadeur représente si peu le Roi son maître, à l’étranger, que ni les rois, ni les ministres, ni les particuliers d’aucun pays, n’ont jamais traité un Ambassadeur comme un Souverain. J’ai ouï dire au Chevalier de Folard que le Maréchal de Créquy avait fait arrêter et s’était fait amener un plénipotentiaire de l’Électeur de Mayence, dont on suspectait la conduite et qu’on avait trouvé dans une salle d’auberge à Strasbourg. Le plénipotentiaire se démenait comme un diable, et s’écriait qu’il était le représentant de son Altesse Électorale. – Vous représentez si mal un Archevêque, lui dit ce Maréchal à coups de boutoir, qu’on vous a trouvé dans une tabagie, et vous représentez si peu l’Électeur-Archi-Chancelier du Saint-Empire, que je vais vous faire appliquer cent coups de bâton si vous dites un mot de plus.
    (Note de l’Auteur.)