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qui avait le goût si pur ! Il avait été répétiteur, en rhétorique, à Sainte-Barbe, pendant deux ans, tandis que le proviseur, qui l’aimait beaucoup, lui cbercbait une éducation à faire. Il aurait été bien fier de le voir entrer dans cette carrière, malgré tous les déboires, toutes les tortures qui y sont attachés, et que Théo Gautier décrit si bien ! Oh ! que c’est vrai, tout ce qu’il dit là-dessus I Mon pauvre enfant n’a-t-il pas été le martyr de sa haute intelligence ? Comme il devait souffrir, sentant sa propre valeur, lorsqu’il mendiait de l’ouvrage et qu’il était refusé durement par des éditeurs qui ne le valaient pas, sous prétexte que ce qu’il écrivait était trop excentrique ! Lorsque je suis venue passer deux mois à Paris, entre nos deux ambassades, Coustantinople et Madrid, (i) dans quelle cruelle positionje l’ai trouvé ! Quel dénuement ! Et moi, sa mère, avec tant d’amour dans le cœur, tant de bonne volonté pour lui, je n’ai pu le tirer de là !

» Je n’ai pas à me reprocher (sic), comme quelques parents dont les enfants se fourvoient pour ne pas s’être laissé guider par eux [et qui], en voyant leurs souffrances, en face de leur malheur, ont la barbarie de leur dire : Je l’avais prédit, il fallait m’ écouter [ou] autres sottises semblables, aussi dures qu’impies. Après avoir vivement lutté anciennement contre sa vocation, du moment qu’il a publié quelque chose,


(i) En i848, le général Aupick avait été nommé ambassadeur à Constantinople. En i85i, il fut envoyé, avec le même titre, d’abord à Londres, et presque aussitôt après, à Madrid.