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BAUDELAIRE À BRUXELLES


Je n’oublierai jamais ce soir mémorable. Les journaux bruxellois avaient annoncé une conférence de Baudelaire, sans commentaires. Le fait d’un grand poète, d’un des esprits absolus de ce temps, promulguant sa foi littéraire publiquement, semblait alors négligeable. Il faut se rappeler l’indifférence totale du Bruxelles d’alors pour la littérature : un petit nombre de lettrés seulement connaissaient l’auteur des Fleurs du Mal ; on vivait dans un air saturnien où se plombait l’Idée.

Le Cercle littéraire et artistique occupait encore le palais gothique qui fait face à l’Hôtel de Ville. Cette fruste et historique architecture, rajeunie depuis comme un joyau de prix, redevenue le dessin d’une châsse exquisement orfévrie, abritait alors des commerces de grainetiers et d’oiseleurs. Tout le rez-dechaussée et les caves leur avaient été départis : c’était une des activités delà Grand’Place. Mais l’étage restait réservé au Cercle ; on montait un perron, on gravis