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la pleine révélation du mal qui avait frappé son fils. Quoiqu’elle fût elle-même à demi paralysée des jambes, elle voulut faire le voyage de Bruxelles pour le soigner.

entre cent : chacun connaît la légende des cheveux verts sur laquelle ont brodé tous les chroniqueurs, et que Champfleury, rapporte dans ses Souvenirs ; elle se réduirait à cette vérité : Baudelaire, atteint d’alopécie — l’alopécie est, on le sait, une des conséquences ordinaires de « l’accident capital et douloureux », et je tiens d’un de ses contemporains, encore vivant, qu’il ne l’évita point,

— se fit raser la tète ; mais, afin que nul ne soupçonnât pour quelle cause étaient tombées les belles boucles que lui connut Th. Gautier (V. la notice des Œuvres complètes), et dont il était assez lier, il se teignit les cheveux en vert, — masquant ainsi une précaution hygiénique sous le prétexte d’une fantaisie excessive, donc savoureuse à son goût.

Au reçu de la lettre de Poulet-Malassis, et sous le coup de l’émotion, M. Jules Troubat répondit par la belle page qu’on va lire. Je n’hésite pas à la donner ; le lecteur, j’en suis certain, y trouvera l’écho de ses propres pensées :

« …Voilà donc comment finiront toujours les poètes ! La machine sociale a beau se tourner et se régulariser pour les bourgeois, les gens de métier, les ouvriers, les artisans et les marchands, aucune loi bienfaisante ne s’établira pour donner à ces natures indisciplinées et impatientes de tout joug, de quoi, au moins, s’assurer leur mort sur un lit à elles. — Mais l’eau-de-vie, dira-ton ?

— La belle affaire ! Vous en buvez, vous, bourgeois, épicier, vous avez autant de vices et même plus que le poète, vous vous enrichissez et vous ne faites pas de vers… Lui, croit que c’est un besoin pour lui, que ce qu’il boit facilite la production (non pas la digestion, comme chez vous)… Balzac se brûle à force de café, Musset s’abrutit