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fiter de la moindre hésitation des pouvoirs publics. « Si la poursuite s’interrompait, un mot vite, pour que mon article se lève comme un Cid, pour vous î » , recommandait le « vieux mauvais sujet » à son cher « misanthrope de la vie coupable ». Et encore, — on sait que le siège du ministère public fut occupé dans cette affaire par M. Pinard : « Je pétrirai Bri’icker, qui pétrira Pinard, qui pétrira vos juges I (î) » Sainte Beuve, auquel Baudelaire avait voué dès i844 une amitié et une admiration déférentes (2), et dont son avocat, M. Chaix d’Est-Ange (le iils), lui avait conseillé de réclamer la secrète assistance, — Sainte-Beuve, empêché par ses relations officielles de prendre parti ouvertement pour son ami, lui rédigea du moins des « Petits moyens de dé


(1) Appendice, X, lettres de Barbey d’Aurevilly.

(2) Voir VEpître à Sainte-Beuve.

Entre tous ses amis, c’est à Sainte-Beuve que Baudelaire porta son affection la plus entière. 11 y avait entre l’auteur de Joseph Delovme et l’auteur des Fleurs du mal des affinités évidentes. Quand Baudelaire les lui signala, Sainte-Beuve répondit : « Vous dites vrai, ma poésie se rattache à la vôtre. J’avais goûté du même fruit amer, plein de cendres, au fond. » Bientôt Sainte-Beuve appela Baudelaire : « mon cher enfant », et devint pour lui « l’oncle Beuve ». Apprenant le rétablissement de son ami, dont l’état avait donné de graves inquiétudes, Baudelaire écrivait à M. Troubat, le dévoué secrétaire du Critique des lundis : « Je n’ai éprouvé d’émotions de ce genre pour la santé d’autrui, que pour Eugène Delacroix, qui était pourtant un grand égoïste. Mais les affections me viennent beaucoup de l’esprit. »