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journal du siège de paris.

l’ennemi. Sur le boulevard, on rencontre les voitures d’ambulance qui ramènent les blessés. Du côté de la Marne, on s’est emparé de Ville-Évrard, de Neuilly et de la Maison-Blanche. On s’attend à une grande affaire pour demain.

Jeudi, 22 décembre. — Froid sibérien. Contrairement à l’attente générale, pas le moindre combat sous les murs de Paris. Le bois devient très rare et se vend à des prix fabuleux. Nous entrons décidément dans la période aiguë du siège. On commence à construire quelques baraques sur le boulevard pour la vente du jour de l’an. Je crois que les petits marchands ne feront pas fortune cette année. Comme maintenant les rues sont peu ou point éclairées, on vend de petites lanternes que l’on accroche à la boutonnière de son paletot.

Vendredi, 23 décembre. — Toujours un froid excessif. Les mobiles occupent la Ville-Évrard depuis hier. Malheureusement, ils n’avaient pas fouillé le sous-sol de la maison. Dans la soirée, les soldats saxons, qui s’étaient cachés dans les caves, sont tombés à l’improviste sur les Français, et dans la bagarre le général Blaize a été tué. Revenus de leur surprise, les moblots ont massacré ou fait prisonniers les Allemands coupables de ce tour de Jarnac. La vie devient de plus en plus difficile pour les petites bourses. Une dinde se vend cent francs.

Samedi, 24 décembre. — Froid canadien. Les pauvres soldats, qui ne sont pas vêtus pour supporter une pa-