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journal du siège de paris.

tinue encore deux mois, nous n’aurons plus que l’embarras du choix, mourir de faim ou périr de froid. Qui vivra verra, ou plutôt mourra.

Jeudi soir, 24 novembre. — Temps gris, mais assez doux. Vives et sérieuses escarmouches à Bondy, où la garde nationale a reçu le baptême du feu. La milice citoyenne a combattu comme des soldats pour de bon et a refoulé les Prussiens dans cette forêt de Bondy, refuge des bandits au siècle dernier, qui retrouve dans les Prussiens ses hôtes d’autrefois. L’armistice revient sur l’eau. Bismark, inquiet de l’attitude de la province, serait beaucoup plus coulant sur les conditions. Rumeurs du jour. Révolution en Espagne. Dans un mouvement populaire à Madrid, Serrano aurait été tué, Prim emprisonné et la république proclamée. L’impératrice Eugénie se rendrait demain à Versailles pour signer un traité de paix. Napoléon III reviendrait en France avec les 325,000 soldats français prisonniers en Allemagne, ferait de Bourges la capitale de la France, et laisserait les Parisiens s’arranger comme ils voudraient dans leur ville, qui ne serait plus que le chef-lieu du département de la Seine. Je n’ai pas besoin de vous dire que c’est là un canard de la plus belle venue. Je souffre de la tête depuis ce matin. Je ne vous en écris pas plus long, car je vais me coucher.

Vendredi, 25 novembre. — Temps sombre comme hier. Fusillade très vive entre les avant-postes du pont de Sèvres et les Prussiens établis à Brimborion. Un cancan d’une jolie force. Révolution à Londres. La