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journal du siège de paris.

disant comme le gladiateur antique : Patria, te morituri salutant. La province ne donne pas signe de vie, du moins à notre connaissance. Nous voici au cinquante-cinquième jour de siège et pas un régiment de la province n’a encore paru sur les derrières des lignes prussiennes. Si Paris se sauve, il ne devra, après Dieu, son salut qu’à lui-même. La vie sociale commence à se ressentir de la prolongation de l’investissement. Le nombre des boutiques fermées augmente tous les jours. Le commerce, à part celui des substances alimentaires, est presque nul. Quelle cataracte de faillites après la guerre ! Pour le moment, comme on ne paie plus ses billets, on tient debout tout de même, mais le quart d’heure de Rabelais sera terrible. Aujourd’hui, on dit que Gambetta n’a pas été à Marseille. En ce moment, il serait à Tours, en proie, depuis près d’un mois, à des accès de folie très inquiétants. Cet état maladif de son esprit expliquerait peut-être les proclamations dans lesquelles il annonçait les victoires des Parisiens, qui avaient chassé les Prussiens du département de la Seine. On assure que le gouvernement de Tours, définitivement brouillé avec celui de Paris, fait procéder en ce moment aux élections pour la constituante. Quel gâchis ! et comment en sortirons-nous ?

Samedi soir, 12 novembre. — Temps sombre le matin, pluie froide dans l’après-midi. Combats d’avant-postes sans résultat sérieux. Les Français se sont emparés de Créteil, où les Prussiens étaient établis depuis le commencement du siège. Les chances favorables à