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journal du siège de paris.

sera peut-être très heureux de demander l’armistice qu’il refuse aujourd’hui dans un langage si hautain. L’horizon est sombre comme un manteau de deuil. Espérons encore, espérons quand même en des jours meilleurs. Les Parisiens sont décidés à aller jusqu’au bout. D’ici à dix jours, nous aurons une boucherie sous les murs de Paris. Hier, on a procédé à l’élection des maires. Mottu, l’iconoclaste, a été réélu à une petite majorité. Échec pour le gouvernement qui l’avait destitué. J’ai toujours la tête qui me fait souffrir.

Lundi soir, 7 novembre. — Un froid noir qui vous gèle le corps et l’âme. Rien de sérieux au point de vue militaire. Aujourd’hui se fait le ballottage dans les arrondissements qui n’ont pas donné une majorité absolue. Ici, on ne se contente pas de la majorité relative comme chez nous, on exige la majorité absolue, c’est-à-dire, la moitié plus un de tous les suffrages exprimés. Demain, on votera pour les adjoints, et, après-demain, on procédera au ballottage. C’est l’élection à jet continu. Les épiciers ont fait disparaître les provisions que l’espérance de l’armistice avait fait mettre en vente. Que ces gens-là prennent garde ! Le mécontentement contre eux augmente chaque jour, et si on m’apprenait, un beau matin, que le peuple souverain a pendu à la lanterne du coin une douzaine de ces honnêtes accapareurs, je n’en serais nullement étonné. Depuis dix jours, nous sommes sans nouvelles de Tours. Les Prussiens occupent-ils la capitale de la Touraine ? Le gouvernement délégué est-il prison-