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journal du siège de paris.

Combat au gouvernement, a répondu que la feuille du citoyen Pyat avait menti sciemment, que son rédacteur était un lâche et un misérable. Le soir, sur le boulevard, on achète les numéros du Combat qui sont en vente dans les kiosques et on les brûle sur le trottoir. Je viens de voir un de ces autodafés en allant chercher le journal. Rouen n’est pas occupé par l’ennemi. Les Normands ont élevé un camp retranché, défendu par 70,000 hommes, autour de leur capitale. Pour faire le siège de Rouen dans ces conditions, il faudrait au moins 120,000 hommes. En ce moment, les Prussiens sont dans l’impossibilité de disposer d’une pareille armée sans rendre ineffectif le blocus de Paris. Par ce temps de pluies continuelles, il est réellement pénible de voir des centaines de pauvres femmes, ouvrières et bourgeoises, obligées de faire la queue à la porte des boucheries municipales. Plusieurs de ces mères de famille sont tombées malades pour avoir attendu pendant cinq ou six heures, les pieds dans la boue et les vêtements trempés, le maigre rationnement que le gouvernement accorde à chaque personne. Si on ne change pas le système actuel de distribution, nous aurons une émeute de femmes avant quinze jours. Aujourd’hui le beurre frais se vend vingt francs la livre.

Vendredi soir, 28 octobre. — Pluie à verse pendant toute la journée. Ce matin, les francs-tireurs, soutenus par un régiment de ligne, se sont emparés du Bourget, près de Saint-Denis. Les Prussiens, qui occupaient ce village depuis le commencement du siège, sont reve-