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journal du siège de paris.

son devoir l’appelle. Il paraît que le blocus de la capitale est moins rigoureux depuis trois jours, puisque 150 mobiles de la Bretagne ont pu nous arriver sans être aperçus par les Prussiens. Quelques centaines de lettres de la province ont été distribuées ce matin. Les courriers d’Amérique nous font toujours défaut. Hier après-midi, une fabrique de produits chimiques a fait explosion à Grenelle. Cet accident, auquel la malveillance est étrangère, a fait 19 victimes, 13 morts et 6 blessés. Le général Trochu vient de notifier aux journalistes que s’ils continuent à divulguer les plans arrêtés par l’autorité militaire, ils seront immédiatement traduits devant la cour martiale. Tout le monde applaudit à cette mesure énergique, qui est absolument nécessaire pour empêcher l’ennemi de connaître d’avance de quel côté se portera l’attaque des assiégés. Vive le Journal de Rouen ! le numéro du 1er octobre a encore pu échapper à la vigilance des Allemands. Les nouvelles continuent à être bonnes. Bazaine aurait fait plusieurs sorties triomphantes et les communications seraient rétablies entre Metz et le Luxembourg. Les paysans commencent à ne plus se laisser intimider par les uhlans. Près de Pontoise, la population d’un petit village a barricadé un pont et, après une lutte de huit heures, a mis en fuite 300 Prussiens. Par ce temps d’excitation fiévreuse, on raconte les histoires les plus absurdes, on répète mystérieusement les prédictions les plus étranges. On dit que, le 2 décembre 1852, une religieuse, dans un moment d’extase, a vu : 1° la chute