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manie laisseront cinq cent mille cadavres sur le sol français, car leur déroute sera effrayante. Poursuivis par l’armée de MacMahon, harcelés par les quarante mille francs-tireurs qui parcourent la Lorraine et l’Alsace, foudroyés par les canons de Strasbourg et de Metz, leur désastre n’aura de comparable que la retraite de Moscou.

D’ici à quelques jours, la partie suprême sera jouée. Peut-être au moment où je vous écris, les armées ennemies sont-elles aux prises entre Verdun et Châlons.

L’anxiété des premiers jours est disparue ; la confiance est revenue. Les boulevards sont aussi fréquentés que si l’utopie de l’abbé de Saint-Pierre était réalisée. On se presse à toutes les mairies de Paris, où le gouvernement fait afficher les nouvelles qu’il reçoit du quartier général. Depuis deux jours, cependant, nous sommes sans nouvelles, parce que les fils télégraphiques ont été coupés par les reconnaissances prussiennes. On n’ose pas dire, point de nouvelles, bonnes nouvelles, car on craint toujours un revers possible.

En attendant, les partis politiques tâchent de faire leurs petites affaires. Les républicains offrent la convention de 92 comme une panacée universelle. Les d’Orléans versent des larmes sur le sort de la France et nous disent, en montrant le comte de Paris : « Prenez mon ours. » Il serait un fin politique celui qui pourrait dire quel sera le gouvernement de la France