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« Pour qu’une goutte d’eau, courant en étourdie,
« Qui tombe et vient tu ne sais d’où,
« T’inspire un pathos long comme une tragédie !
« Tu dus être ou poète ou fou.

« Ces beaux rêves du cœur qui, là-haut sur la terre,
« Ont tant d’attraits et de beauté,
« Quand on est près de moi se brisent comme verre
« Au choc de la réalité.

« Oui, quand la vie encor, circulant dans tes veines,
« T’apportait les hymnes du soir,
« Tu pouvais quelquefois dans tes douleurs humaines
« Voir passer un rayon d’espoir.

« Mais au moment suprême où la mort vint te prendre,
« T’emporter dans ses bras hideux,
« L’espoir ne voulut pas avec elle descendre
« Dans mon palais mystérieux.

« Si cette fleur du ciel qu’on nomme l’espérance
« Sur les tombeaux peut se cueillir,
« Jamais dans le séjour de l’éternel silence
« On n’entend ses feuilles frémir.

« Non, cette goutte d’eau, ce n’est pas une larme
« Que verse l’amour maternel
« Cherchant à soulever, avec un divin charme,
« Le voile qui cache le ciel.