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« Je laisserai tes os dans cette fosse impure
« Où ton désespoir s’exhala,
« Pour qu’on dise, en voyant ce qui fut ma pâture :
— « Le Roi, le Ver a passé là ! »

le mort.


« Ta voix est comme un glas, ô Ver ! et ta parole
« De son souffle maudit veut flétrir l’auréole
« De la pure et douce amitié !
« Mais es-tu donc certain, toi qui parles en maître,
« Que les hommes aient vu tomber et disparaître
« Le culte saint de la pitié ?

« Il est encor là-haut plus d’une âme pieuse
« Qui s’en vient chaque soir, triste et silencieuse,
« Pour nous implorer le Seigneur.
« Il est encor là-haut plus d’une âme bénie
« Qui pense aux pauvres morts et qui fait de sa vie
« Un holocauste à leur douleur.

« Il est… Mais qu’est-ce donc qui tombe sur ma tête ?
« Ô Ver ! est-ce un convive invité pour la fête
« Que tu vas donner sur mon corps ?
« Pour dévorer ma chair te faut-il donc un aide ?
« Ne peux-tu prendre seul ce peu que l’on possède
« Dans l’avare cité des morts ?

« On dirait une larme, une larme brûlante,
« Qui tombe sur mon front. Une voix gémissante