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concubinage comme à la triste vie d’hôtel. Je commençais à désespérer quand le ciel me suggéra l’idée de te faire désormais, purement et simplement, payer de ta poche tes fautes ; solution heureuse, j’ose le croire, définitive en tout cas, et à laquelle je m’arrête. De cette heure donc, tu peux en toute tranquillité, forte du serment que je te fais de ne me plus mettre en colère sous quelque prétexte que ce soit, donner libre cours aux élans de ton infernal caractère. Quoi que tu dises, quoi que tu fasses, tu n’auras de moi ni une chiquenaude, ni le moindre rappel à l’ordre : je mettrai cela sur la note, simplement. Tu paieras à la fin du mois. Hurle, braille, rugis, vocifère, fais du scandale tout ton soûl, trouble tant que tu voudras le repos des voisins ; tu n’as à t’occuper de rien : tu paieras à la fin du mois. Plus de querelles, j’en ai assez. Plus de pugilats, j’en suis las. Énergiquement déterminé à avoir la paix chez moi et ne l’ayant pu obtenir ni par les bons procédés, ni par les moyens extrêmes, je prends le parti de l’acheter avec tes propres deniers, chose qui ne fut point arrivée si tu me l’avais donnée pour rien. J’ai dit. Je ne te retiens plus. Bonjour. Tu peux t’en retourner à tes occupations. Je suis au désespoir de te quitter si vite, mais le devoir m’appelle, l’heure me presse et mon journal n’attend pas.

VALENTINE

Quand tu auras assez causé, tu le diras.

TRIELLE

J’ai assez causé.

VALENTINE

C’est heureux. Mes cent cinquante francs.

TRIELLE

Pas un sou.

VALENTINE

Tu ne veux pas me les donner ?

TRIELLE

Non.

VALENTINE

C’est une idée fixe ?

TRIELLE

Oui.

VALENTINE

La maison est lourde.

TRIELLE

Je le sais.

VALENTINE

Nous avons des charges.

TRIELLE

Je ne dis pas.

VALENTINE

Je te préviens qu’avec 650 francs, il me sera impossible d’y faire face.

TRIELLE

Tu leur tourneras le dos.

VALENTINE