on ?... J'en prends sept !
Sept?
Oui, sept !
Par semaine ?
Par jour.
Vous vous fichez du monde. Citez-les donc un peu, vos sept consommations. Non, mais citez-les donc, qu'on voie !
Répondez.
Monsieur, c'est bien simple. J'arrive et je demande un café. Bon, on me sert un verre de café, trois morceaux de sucre, une carafe d'eau et un carafon de cognac.
Ça fait une consommation.
Ça fait une consommation.
Jusqu'ici nous sommes d'accord !
Bon ! Je bois la moitié de mon café et je comble le vide avec de l'eau. Ça me fait un mazagran. Deuxième consommation.
Quoi ? Quoi ?
Laissez parler le prévenu.
Dans mon mazagran, je mets de l'eau-de-vie t ça me fait un gloria.
Ah çà ! Mais...
Ces interruptions continuelles sont insupportables. Je supplie la partie civile de laisser mon client s'expliquer.
Bon ! Je prends un deuxième morceau de sucre et je le mets à fondre dans l'eau, ça me fait un verre d'eau sucrée. Dans mon verre d'eau sucrée, je reverse du cognac : ça me fait un grog. Mon grog bu, je m'appuie un peu de cognac pur, ça me fait une fine Champagne.
Et enfin?
Enfin, sur mon dernier bout de sucre, je verse le restant de mon carafon. J'y mets le feu, ça me fait un punch. Total : un café, un mazagran, un gloria, un verre d'eau sucrée, un grog, une fine et un brûlot. Sept consommations.
C'est exact !
Charmant ! Et à la fin du compte, combien est-ce que je touche, moi? Six sous ! Et vous croyez que ça m'amuse, après que vous m'avez rasé toute la soirée, d'inscrire six sous à mon livre de caisse ?
Ça vous embête ? Eh bien, prenez une caissière
Vous reconnaissez avoir frappé le plaignant?
Non, m'sieur. Je lui ai mis un marron, voilà tout.
A propos de quoi ?
Il m'avait pris par le bras pour me faire sortir de force, alors je lui ai mis un marron !
Vous ne nous aviez pas dit ça, monsieur Alfred.
En effet.
Mais, Monsieur le président, il fallait bien que je l'expulse, il ne voulait pas s'en aller.
Il fallait envoyer chercher les agents de la force publique. Vous n'aviez pas le droit de vous faire justice vous-même.
C'est clair comme le jour.
M. Alfred tente de placer un mot.
Taisez-vous. Maître, vous avez la parole.
Plaise au tribunal adopter mes conclusions, renvoyer mon client des fins de la poursuite et condamner la partie civile aux dépens. Messieurs, s'il en était de la véritable vertu comme il en est de la femme de César, elle ne serait pas soupçonnée, et je ne connaîtrais pas l'honneur, compliqué de tant d'amertume, d'avoir à la défendre aujourd'hui devant vous. Certes, depuis bientôt vingt ans, qu'apôtre du