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MADAME DESBORDES-VALMORE À BORDEAUX

En septembre 1840, Valmore est à Bruxelles, où il a été engagé au théâtre de la Monnaie. Sur le point d’aller le rejoindre, sa femme pense encore à Bordeaux :

Libres de choisir, Valmore et moi, nous quitterions Paris qui ne va pas à nos maux et à nos goûts solitaires ; et ce serait Bordeaux, avant tous les pays, où nous ramèneraient nos souvenirs de cœur. Voilà ce qui est vrai et ce que nous avons dit cent fois. Je vous ressaisirai avec une joie infinie, bon Gergerès. Vos sœurs ont laissé des souvenirs doux et vivants dans le cœur de mes enfants, et je les aime comme des anges. Ce climat doux et plein de soleil enchante encore mon imagination. En voilà donc plus qu’il n’en faut dire pour vous donner une idée de mon penchant fidèle vers Bordeaux[1].

Et elle continue sur ce ton, affirmant que Valmore, qui a maintenant quarante-sept ans, accepterait de jouer à Bordeaux les pères nobles et demandant à Gergerès s’il y aurait quelque espoir pour lui au Grand-Théâtre. Le même refrain revient dans une lettre du 27 novembre 1841[2]. À partir de cette date, Marceline perd l’espoir de revenir jamais dans la ville qu’elle aime tant. Son mari a trouvé à Paris une situation assez fragile : il est régisseur à l’Odéon[3]. Mais c’est surtout l’éducation de ses enfants qui la retient dans la capitale. En 1845, la santé de sa plus jeune fille, Inès, la « petite Bordelaise », donnant à la mère de vives inquiétude, c’est à Bordeaux qu’elle songe de nouveau :

Notre chère Inès est toujours si malade qu’un voyage seul à Bordeaux (à la lettre) rendrait la santé perdue à l’ombre de mes chagrins… Nul changement ne survient dans la santé de ma chère Inés. Il lui faudrait Bordeaux et son soleil[4].

Gergerès s’offrait de nouveau. Ondine écrivait, le 31 octobre 1846, à son père :

Je reçois à l’instant une seconde lettre de M. Gergerès, toute flamme pour nos projets méridionaux. Selon lui, une petite ville, comme nous

  1. Lettres inédites, p. 71.
  2. Ibid., p.73. — Cette lettre fut écrite peu après un voyage de Gergerès à Paris, où il alla voir les Valmore. Marceline écrivait le 12 octobre à Ondine : « Gergerès est affligé de ne pas te voir à ce voyage ; il veut tous nous fixer à Bordeaux. Beau rêve ! » (Ibid., p. 305.)
  3. Ibid., p. 78.
  4. Ibid., p. 81, 83.