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Un fait venait encore de les impressionner fâcheusement. Contre son habitude, Théodore ne leur avait point communiqué la lettre de son fils ; il s’était borné à dire que James confirmait en tous points le récit de l’interne, omettant de mentionner le départ de celui-ci pour le champ de bataille. Cette attitude semblait étrange aux charbonniers : en vérité c’était la première fois que le coiffeur, toujours si heureux et si fier de leur faire lire les pages de son fils, montrait tant de réserve. Nul doute pourtant que, selon sa coutume, James ne parlât longuement de son frère d’armes surtout en la circonstance et lorsque Victor devait être plongé dans le plus profond abattement…

Il fallait insister pour voir la lettre : devant un refus embarrassé ou formel, on saurait au moins à quoi s’en tenir.

Le charbonnier répondait qu’il y avait bien songé, la veille, en se faisant raser chez Théodore ; mais, au milieu des commentaires que la mort de Prosper avait provoqués dans le salon, un soldat allemand était entré dont la présence avait instantanément fermé la bouche de tout le monde.

Passe encore si ç’avait été le premier soldat venu… On en aurait été quitte pour parler plus bas. Mais c’était Mosheim ! Alors il fallait prendre garde…

— Vous auriez dû retourner ce matin chez le coiffeur avec la lettre de Victor, laquelle vous lui auriez remise en échange de celle de son fils.