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parfois en dépit des efforts qu’elle faisait pour échapper à sa séduction, la ressaisissait avec intensité. Elle s’y abandonnait plus mollement aujourd’hui, dût-elle ensuite retomber affaissée sur elle-même après que le vain mirage se serait de nouveau dissipé…

Comme elle relevait lentement la tête, ses yeux se posèrent sur la grande photographie pendue au mur au-dessus du lit du petit garçon. C’était le dernier portrait de Prosper à sa sortie de l’école de Gaillon sous l’uniforme de lieutenant au 9me de ligne. Elle prit la chère image dans ses mains et tressaillit de la voir pour ainsi dire s’animer en la contemplant de plus près. Elle pensait à cette vie si courte mais si remplie de vaillance, de bonté… En ce moment, elle se rappelait les lettres tant lues et relues du cher soldat. Certaines phrases en résonnaient dans sa mémoire comme s’il lui parlait, l’une d’elles notamment : « Aie confiance, je sens que ma « fatalité » est heureuse… »

Cependant, distrait de son livre, l’enfant s’était redressé pour regarder avec sa mère le « brave soldat » ainsi qu’on le nommait toujours devant lui.

— Mami, dit-il tout à coup, cette nuit, le brave soldat est venu m’embrasser et il m’a dit : « Fils, puisque tu es bien sage, je reviendrai bientôt… » Alors, je l’attends !

La jeune femme pâlit d’émotion à ces naïves paroles comme si elles eussent contenu un sens prophétique…