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saient à ses yeux un personnage plutôt mystérieux. C’était Martha qui avait ramené Tom à la quincaillerie. Et puis, cette précieuse lettre lui annonçant que son fils était authentiquement reconnu, n’était-ce pas encore Martha qui la lui avait remise en se dérobant à toute explication ?

Martha lui inspirait donc une confiance absolue, malgré la réserve que la jeune fille observait, même avec elle, quant à la divulgation de ses gestes clandestins. Or, ne semblait-il pas, aujourd’hui, qu’elle eût été entraînée au delà de sa discrétion ordinaire ? Camille ne l’avait jamais vue aussi verbeuse : toutes les fibres de son âme se tendaient pour découvrir la cause de ces effusions, que n’avait pu contraindre l’appréhension de ranimer son chagrin engourdi. On eût dit que Martha avait mis du demi-mot, du secret dans sa manière de réconfort.

— Tout recommencera… Nous serons tous heureux, fit-elle rêveusement en répétant les paroles de son amie. Oui, le spectacle de votre bonheur me sera doux sans doute, mais pourra-t-il me faire jamais oublier ce que j’ai perdu !

Elle caressait la tête blonde de son fils :

— Enfin, toi, tu me restes, dit-elle sourdement ; plus tu grandiras, mieux je me résignerai sans doute…

Cependant Martha les regardait tous deux sans que l’expression heureuse de son visage se nuançât de la moindre teinte de mélancolie :

— Oui, s’écria-t-elle en pressant le petit contre son cœur, oui, tu deviendras un beau grand garçon comme ton père… Allons, continue à être