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Comme vous avez tort ! Je serais un si bon confident !…

Elle s’était baissée pour saisir le panier de victuailles préparé par son père et essayait de le soulever dans l’intention de le déposer au fond de l’armoire réfrigérante. Mais, quelle que fût la vigueur de ses bras, la charge était décidément trop lourde.

— Attendez, Mademoiselle Emma, je vais vous aider !

En même temps, il accourut, empoigna le panier par ses deux anses, le balança et, d’un effort facile, le lança dans le coffre.

Elle le regardait avec surprise :

— Je ne vous croyais pas si fort, dit-elle d’une voix moins indifférente. Ça n’est pourtant pas au Conservatoire que…

— Bé, c’est justement ce qui vous trompe ! répondit-il avec une joyeuse fatuité. On nous oblige à faire toute sorte d’exercices dans les classes. Car un acteur ne doit pas seulement avoir une bonne voix, mais aussi des muscles. Il faut être un « costaud », quoi !

— Allons donc, et pourquoi ça ?

— Hé, les pièces ne manquent pas où l’on est forcé d’emporter sa maîtresse à bras tendus, à moins qu’on ne l’étouffe comme Othello !

— Eh bien ! c’est du propre !

Il sourit à ce cri naïf : elle était vraiment drôle mais combien plus séduisante encore !

De fait, jamais Emma Vergust n’avait été plus en beauté que ce soir. C’était une superbe blonde d’une carnation chaude, lactée comme les