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L’enfant d’Adelaïde était sans doute pour quelque chose dans cette confiance que la jeune fille accordait de nouveau à la vie. Tout d’abord, elle avait paru assez indifférente à l’égard de ce petit que nul élan ne la portait à caresser, bien qu’un observateur pénétrant eût sans doute remarqué le regard prolongé qu’elle attachait parfois sur lui. Après cela, craignait-elle de déplaire à Mme Lust en accaparant le marmot. Pourtant, cette contrainte qu’elle semblait imposer à son sentiment ne dura guère : l’enfant eut vite fait de l’apprivoiser jusqu’à devenir son cher souci et comme son idole.

Sous prétexte de rendre service à Adélaïde, qui n’entendait pas s’affranchir des rudes besognes du ménage, l’orpheline avait décidé qu’elle s’occuperait dorénavant du petit garçon, et son zèle de nurse ne fit que croître en voyant la préférence que le marmot se mit à lui témoigner manifestement dès les premiers jours de son noviciat. De fait, il aimait cette voix câline, ce visage plus jeune, ces mains si douces, et il souriait à Camille de toute sa petite frimousse ronde et joyeuse.

— Mais Fille, disait parfois le bon père Claes émerveillé de la dextérité de sa nièce, on dirait que tu n’as jamais fait autre chose dans ta vie!

Tandis que la quincaillière ajoutait pardessus son éternel tricot :

— Mais oui, Chère, où est-ce que tu as appris ça donc?

Puis ils retombaient tous deux dans un silence dont il était facile d’interpréter les pensées.