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quelque douceur. Tout de suite, la gratitude de Camille se manifesta par une affection empressée que les bons quincailliers lui rendaient d’un cœur attendri et qui semblait se reprendre à l’espérance.

Près de quatorze mois qu’ils n’avaient vu leur petite-nièce ; elle était un peu changée ; sous la robe de deuil, le buste gardait son galbe, son dessin très pur. Mais, le visage s’était légèrement amaigri ; il n’en avait peut-être que plus de charme avec son expression de jeunesse si gracieusement mélancolique. Ce sourire, tendre et sérieux, était d’une jeune veuve plutôt que d’une jeune fille : le chagrin la faisait femme aujourd’hui.

On l’avait installée au second étage dans l’appartement de Prosper où tout était demeuré à la même place depuis le départ du soldat. La chaise, placée devant le bureau gardait sa position de biais comme l’avait laissée le jeune homme en se levant pour s’en aller à jamais. Une boîte de papier à lettre reposait encore sur le buvard, entr’ouverte ; Prosper s’en était servi pour rédiger à la hâte son bref testament. Et derrière l’écritoire, dans le grand vase de grès, s’épanouissait toujours une gerbe de fleurs saisonnières, renouvelée chaque matin par des mains pieuses.

Ce n’est pas sans ressentir de nouvelles souffrances qu’elle avait pris possession de ces chambres qui lui rappelaient de si brûlants souvenirs, et bien des jours s’écoulèrent avant que son âme finit par y trouver le recueillement. C’est le