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LA POLITIQUE DU JAPON AU DÉBUT DE LA GUERRE EUROPEENNE.

peuvent avoir la portée et la précision qu’on a voulu leur donner. Le texte est celui de l’ultimatum du 15 août ; on y lit : « remettre sans condition ni compensation… tout le territoire loué de Kyao-tcheou en vue d’une restitution éventuelle dudit territoire à la Chine ». De nombreux journaux en Chine, plusieurs aux États-Unis, quelques uns même en Angleterre, ont vu dans cette phrase une promesse formelle ; pour des publicistes non responsables, l’erreur est pardonnable ; il est plus surprenant que les membres du gouvernement chinois, ou une partie d’entre eux, y soient tombés. Dès le mois d’août, des journaux japonais avaient réfuté la fausse interprétation de la clause visée, et l’explication a été souvent reproduite sous diverses formes : la restitution à la Chine n’est mentionnée que comme suite à la remise volontaire de Kyao-tcheou par l’Allemagne ; celle-ci n’ayant pas répondu à l’ultimatum, le Japon amené à lui faire la guerre, s’est emparé de vive force de Tshing-tao et de plusieurs îles du Pacifique, il en est donc maître par droit de conquête, ce qui est bien différent de l’hypothèse prévue dans l’ultimatum. Dans ce sens, le baron Katô, attaqué à la Diète à propos des engagements qu’on lui attribuait, déclara qu’il n’avait promis nulle restitution ; il ne dit pas d’ailleurs que le Japon ne restituerait pas, mais il laissait entendre qu’il y avait à choisir le moment. L’opinion la plus générale était que seul le congrès futur pourrait trancher le différend et que jusque-là le Japon devait rester à Tshing-tao. Dans les polémiques s’exacerbant en décembre et janvier, un journal anglais de Chine déclara que, si le Japon restituait sans délai le territoire litigieux, il ne s’écoulerait pas trois mois avant que les Allemands y fussent maîtres de nouveau[1].

Divers indices décelaient une action allemande dans les milieux indigènes à Chang-hai, au Chan-tong, à Péking ; c’est à cette influence qu’on attribua l’étrange démarche du mois de janvier, suite d’une série de tentatives qui avaient commencé au lendemain de la prise de Tshing-tao. Par une simple note adressée aux légations japonaise et britannique (7 janvier), le Cabinet chinois fit connaître qu’il avait supprimé la zone de guerre précédemment établie et que l’armée japonaise n’avait qu’à évacuer la province du Chan-tong.

  1. Japan Mail, 22 août 1914, p. 180 ; 14 novembre, p. 464, 465 ; 19 décembre, p. 584, ; 9 janvier 1915, p. IV.