la presse. L’opinion aimait à se rappeler la clairvoyance qu’il avait montrée à propos des affaires russes de Mantchourie, son rôle dans les sociétés visant à étendre l’influence japonaise, sa passion constante de la grandeur du pays au dedans et au dehors. Ces sentiments le mettaient à présent d’accord pour une action ferme avec ses anciens adversaires, le duc Yamagata, le principal organisateur de l’armée, le chef des conservateurs, et les autres gen-rô. Un tel rapprochement fut salué par tous comme le retour à la concorde nationale, fort ébranlée depuis deux ans, d’abord par la crise constitutionnelle, ensuite par les scandales de la marine : la guerre européenne refaisait l’union du pays et purifiait l’atmosphère.
Les vues du Cabinet concordaient encore avec le sentiment de la presse et de la nation envers les autres États belligérants. La France, la Russie et l’Allemagne s’étaient unies en avril 1895 pour conseiller au Japon vainqueur de renoncer à la possession du Lyao-tong ; tandis que les trois ministres agissaient à Tôkyô, les commandants des trois flottes se tenaient prêts à les appuyer ; l’amiral de Beaumont sut modérer l’ardeur de son collègue russe, de même que le ministre de France, M. Harmand, parvenait à donner à cette démarche pénible le caractère le moins offensant et à s’assurer toute la considération du Cabinet japonais. De cette intervention, le Japon garda du ressentiment surtout contre la Russie et l’Allemagne ; au contraire, la France, malgré ses précédentes tentatives sur Formose, déclara bientôt qu’elle n’avait nulle intention de s’immiscer dans les affaires de l’île et, par son désintéressement avisé, adoucit l’amertume du gouvernement mikadonal ; trois ans plus tard, cette impression s’accentua encore, quand on vit l’Allemagne et la Russie s’installer à Kyao-tcheou et à Port-Arthur, l’une sur le territoire rétrocédé, l’autre en un point dominant les communications de Formose avec l’Empire : l’établissement contemporain de la France à Kwang-tcheou-wan ne touchait nullement aux intérêts du Japon, que les débuts de Formose n’encourageaient guère à la colonisation tropicale. Affectées par les débats au sujet des questions de neutralité pendant la guerre avec la Russie (1904-1905), les relations franco-japonaises reprirent bientôt leur cordialité, le Japon ne manquant pas, après coup et son intérêt n’étant plus en jeu, d’appré-