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LA POLITIQUE DU JAPON AU DÉBUT DE LA GUERRE EUROPEENNE.

depuis que leur gouvernement avait déclaré (19 mars 1913) se retirer du consortium financier des six Puissances ; il était question d’une entreprise de dragage, de concessions à la Standard Oil Company portant non seulement sur le Cheàn-si, mais sur la région de Je-ho qui rentre manifestement dans la sphère japonaise ; un emprunt aurait été envisagé pour organiser sous la direction américaine un port à San-tou-ngao, au Fou-kyen, province où le Japon a des droits spéciaux. On avait même parlé d’une alliance sino-américaine et, malgré les explications très nettes de Washington et les dénégations de Tôkyô[1], l’opinion des cercles politiques restait hésitante dans les deux pays. La question de Kyao-tcheou réveillait les appréhensions, que la presse allemande des États-Unis chercha aussitôt à surexciter ; maîtresse de cette base navale et des îles allemandes du Pacifique, n’étant plus contre-balancée par les vaisseaux allemands, appuyée sur l’alliance anglaise renforcée, la flotte japonaise n’allait-elle pas dominer des Philippines à Panama ? L’interprétation large de la convention anglo-japonaise prévalut toutefois, mais les assurances données par le comte Ôkouma et le baron Tsinda, ambassadeur, de restituer le territoire de Kyao-tcheou à la Chine et de respecter l’intégrité territoriale de cette république, satisfirent le président Wilson, qui fit une déclaration de neutralité (21 août)[2]. Le Cabinet de Washington était déjà mis en garde contre les menées allemandes par la proposition qui lui avait été faite de lui remettre en dépôt le territoire de Kyao-tcheou jusqu’au jour de la restitution à la Chine[3]. Cette Puissance, en effet, ne pouvait rentrer en possession avant l’expiration du bail de quatre-vingt-dix-neuf ans que moyennant le remboursement de toutes les dépenses faites par l’Allemagne, et elle désirait peu assumer cette charge. L’offre captieuse de Berlin avait donc été repoussée, et la plus stricte neutralité conseillée au président Yuen[4].

L’attitude énergique du premier ministre Ôkouma, pour être contraire aux idées d’une partie des Pairs, ne trouvait pas moins des approbateurs dans les milieux les plus divers depuis l’armée jusqu’à

  1. Japan Mail, 13 juin 1914, p. VII.
  2. Id., 29 août 1914, p. IV.
  3. Id., 29 aoủt 1914, p. IV.
  4. Id., 22 aoùt 1914, p. 180 ; 26 septembre, p. 294.