une action économique commune des deux pays, action difficile à concevoir et à réaliser ? et, si l’on allait plus au fond, l’alliance même était-elle intacte en face de l’hostilité persistante des dominions britanniques, après le renouvellement de 1911, qui exceptait le cas d’hostilités entre le Japon et les États-Unis ? Bon nombre de Japonais ne croyaient pas que l’Angleterre gardât à l’égard de leur pays ses sentiments de naguère ; d’autres, sans fermer les yeux aux difficultés d’application, étaient persuadés que le Cabinet de Londres cherchait loyalement à les résoudre. Tous admettaient l’utilité de l’alliance pour le pays, surtout peut-être en cas de complications sur le Pacifique ; tous furent unanimes aussi à reconnaître le devoir incombant à l’Empire et à vouloir fournir à la Grande-Bretagne une aide équivalente à celle qui avait été reçue en 1904-1905.
Mais quelle était la limite de ces obligations ? Pendant les conversations entre Tôkyô et Londres, une délégation de la Chambre des Pairs comprenant des membres de tous les groupes vint recommander au Premier Ministre la plus stricte modération dans les décisions du gouvernement, en lui signalant la nécessité des économies et le danger d’un appel de la Chine à une tierce Puissance ; le bruit courait en même temps qu’à moins d’une provocation de l’Allemagne, l’armée japonaise resterait inactive et que la flotte se bornerait à enfermer à Kyao-tcheou les vaisseaux ennemis[1]. Les timorés publiaient leurs idées politiques, espérant en rendre plus aisée la réalisation. Les États-Unis, que l’on ne nommait point, étaient naturellement désignés à l’attention du gouvernement par le souvenir des difficultés renaissantes ; malgré la cordialité voulue de manifestations réitérées, les Japonais étaient toujours en butte à la méfiance des représentants et de la presse dans les États de l’ouest ; divers projets de loi sur l’immigration, sur la naturalisation des Asiatiques, sur l’accès au droit de propriété étaient discutés ou même votés ; ce mouvement s’était à l’automne de 1913 étendu à la Floride[2], et parmi les troubles du Mexique certains journaux pensaient discerner des intentions d’intervention japonaise. Les Japonais, de leur part, étaient en éveil sur l’activité croissante déployée par les Américains en Chine,