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Comme un bouton de rose en avril languissant,
Qui perd sa couleur vive, alors que la tempeste
Ou l’outrage du vent lui fait baisser la teste ;
Ou comme un jeune lys, de la pluye aggravé.
Laisse pendre son chef, qui fut si relevé[1].

Malherbe, lui, n’a guère d’imagination, il n’aime pas non plus la nature :

Il y devient plus sec, plus il voit de verdure,

et s’il parle des fleurs à tout propos, ce n’est pas pour le plaisir de les décrire, mais uniquement pour remplir ses vers. Toutes ces pièces qu’il écrit sur commande, il les fait avec lenteur, avec effort, cherchant dans tous ses souvenirs « un trait qui lui paraîtra triable ». Il n’est pas étonnant qu’il ait été parfois si gauche. Sainte-Beuve, écrivant à un âge où il était encore tout plein de ses études latines et de sa double rhétorique, disait de Millevoye mourant : « Il incline la tête, comme fait la marguerite coupée par la charrue, ou le pavot surchargé par la pluie[2] ». Il mettait « la marguerite » parce qu’il avait regardé les champs : Malherbe ne regarde que les livres et le Louvre, et fait rimer « violette » à « squelette ».

Virgile présentait en outre, dans « son langage qui est tout épigramme[3] », bien des vers lapidaires et des pensées fines dont les poètes classiques, et surtout Racine, devaient faire leur profit.

Mais c’est à Horace plus qu’à Virgile, nous allons le

  1. Desportes, éd. Michiels, p. 318.
  2. Sainte-Beuve, Portraits littéraires, t. I, p. 410.
  3. Montaigne, Essais, III, 5.