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se garder de mourir de faim. C’estoit partout la face de la mort[1]. » Aussi la dépopulation fut générale, les villages déserts, et les villes réduites au quart de leurs habitants[2]. Plusieurs de nos paroisses, comme Jussey, Montigny, Lure, Bougey, Laître, Ouge et Baulay, en conservent une preuve muette, mais bien éloquente, dans leurs registres de baptêmes de cette époque. Pendant huit ou dix ans, ils constatent à peine quelques naissances, dans des communautés qui les comptaient, les années précédentes, par trente, quarante, cinquante ou davantage[3]. Leurs habitants que la mort n’avait pas moissonnés, avaient émigré de toutes parts en pays étrangers,

  1. Girardot, p. 212 et 213
  2. A Langres et dans ses environs, dès le mois d’août, les cimetières était remplis et l’on enterrait partout. La peste diminua sur la fin de l’année, après avoir enlevé dans cette contrée, avec l’aide de la guerre, 5,500 personnes, dont 58 ecclésiastiques. (Macheret, fol. 24.)
  3. Jussey perdit tous ses habitants ; il en revint 95 en 1641, et l’administrateur de la paroisse, Etienne Clerc, commença de nouveaux registres par ces mots. « Noinina infantium in ecclesiâ Jussey baptizatorum post reditum populi. » Point de naissance cette année-là, une seule en 1642 ; six en 1643. La parenté a tellement disparu que le sieur Légier est parrain de cinq de ces enfants. La population demeure stationnaire jusqu’en 1652, qui offre treize naissances ; ce qui fait supposer quatre à cinq cents habitants. À Laître, le curé Pierre Aillet commence son registre, en 1641, par ces mots : « Ab anno Domini 1636, vix ulli baptizati fuerunt, quia ob continuos bellorum tumultus qui tunc temporis totam provinciam devastarunt, major pars populi proprios œdes deserens in exteras regiones aufugerat. » Bougey, qui avait compté 35 actes en 1635, dont 15 pour Oigney, n’eut aucune naissance en 1637, deux en 1638, cinq en 1639, deux en 1640, cinq en 1641, une en 1642, cinq en 1643, six en 1644, onze en 1645, huit en 1646. Le registre est sans visa de l’officialité diocésaine, du 19 juillet 1634 au 14 juin 1647, date du passage de Jean Millet, procureur général et fiscal de l’archevêque. À Ouge, il ne resta pas une maison debout, sauf le chœur de l’église. Le village ne sortit de son tombeau qu’en 1642. On compta quatre baptêmes en 1648, sept en 1649, huit en 1650, six baptêmes et une sépulture en 1651. Le village ne fut repeuplé qu’en 1688 À Baulay, de 1636 à 1644, pas une seule naissance. À Montigny-lez-Cherlieu, il ne resta que deux maisons. À Lure, on ne trouve que dix actes de baptêmes sur les registres, de 1638 à 1643. Chatillon-sur-Saône, ruiné en 1635, n’avait encore que huit habitants en 1648. (V. Notice sur Chatillon.)