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l’éducation anglaise.

autres d’en profiter. Ce n’est donc pas toujours une punition, c’est souvent un simple avertissement, une prière aux parents de reprendre l’enfant. Ceci répond à une idée très britannique qui est celle de sélection ; dans l’ordre physique comme dans l’ordre moral, c’est toujours l’élite que l’on a en vue, car une phalange supérieure et peu nombreuse rend infiniment plus que la médiocrité très répandue ; aussi toutes choses tendent à donner à ceux qui ont déjà, comme dans l’Évangile.

Aux yeux des Anglais la vie de collège n’est admissible qu’à condition d’être une continuation de la vie de famille ; prendre un enfant, l’enfermer avec d’autres enfants, le sevrer absolument de toute communication avec les siens et avec le monde extérieur, c’est pour eux une monstruosité. Il faut entourer les collégiens de tout le confort possible, veiller à ce qu’ils ne perdent aucune des habitudes de la bonne société, à ce qu’ils ne négligent aucun des soins hygiéniques et même des recherches dont on a entouré leur enfance. Dans les public schools, et c’est là le principal point de différence avec les écoles congréganistes, les élèves sont disséminés chez les professeurs, lesquels en ont chacun entre dix et trente ; s’ils sont trop nombreux pour dîner chaque jour avec lui, il les invite au moins à prendre le thé. Il m’est arrivé de m’asseoir à ces tables : le service est parfait, la nourriture simple, mais excellente ; on n’entre pas en rang, on ne regarde pas les étrangers avec des yeux ébahis, parce qu’on a l’habitude d’en voir et qu’on sait être poli et faire gracieusement les honneurs. À Eton je me souviens dans une de ces maisons appelées boarding houses d’avoir été frapper à la porte d’un garçon de ma connaissance sous la conduite de la fille du professeur qui est entrée avec moi et a fait un bout de causette ; mon jeune hôte revenait du cricket et avait eu l’étonnante idée de se laver les mains et le toupet de demander de l’eau chaude, encore ! Comme c’est efféminé, n’est-ce pas ? Que voulez-vous ? Les Anglais se sont aperçus que quand on ne donnait pas d’eau chaude aux enfants, les enfants ne se lavaient pas, voilà tout !

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Deux choses dominent dans le système anglais, deux choses qui sont en même temps les moyens de remplir ce programme : La liberté et le sport.

La route que parcourt l’enfant français pour arriver à l’émanci-