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1894. C’est un document de la plus haute valeur qui a été fréquemment commenté et cité.

Peu à peu d’assez beaux challenges avaient remplacé les coupes en simili et les petits fanions de soie peinte qui formaient les modestes enjeux de nos débuts. En septembre 1893, notamment madame de Montgomery m’avait donné une magnifique reproduction de gladiateur mourant sur le socle marmoréen duquel elle avait fait graver un de ses sonnets qui m’était dédié. Il arriva plus tard une amusante histoire à propos de ce gladiateur. Je l’avais attribué au championnat national de Cross-Country. Une année que le Racing-Club en était le détenteur, les donateurs, en visitant le chalet de la Croix-Catelan, y trouvèrent le socle vide. Enquête ; on apprit alors que sur les objurgations pudibondes d’un membre du cercle, le comité avait décidé de reléguer cet homme nu dans une armoire. Madame de Montgomery fut si irritée qu’elle voulut faire enlever la statue par ses gens. J’eus peine à l’en empêcher. Elle avait raison en fait mais, sur l’intervention de M. Gondinet, le comité du Racing-Club comprit de quel ridicule il se couvrait et le gladiateur reprit possession de la place d’honneur à laquelle il avait droit.

Nos règlements se complétaient et s’amélioraient. Jacques de Pourtalès et L. H. Sandford avaient pâli sur ceux du Tennis et nous n’aurions plus l’humiliation de voir affichés dans les cercles français, à Puteaux, par exemple, que les règles suivies « sont celles du All England L. T. Club ».

Le nouveau chef de l’État avec lequel j’entretenais des relations antérieures puisqu’il était député du Havre, accepta le 9 mai 1893 de venir assister aux championnats scolaires de courses à pied. M. Félix Faure fut très acclamé ce jour-là. Le fut non moins, quelques semaines plus tard, le Père Didon présidant la réunion d’Arcueil. Le beau terrain de jeu qu’il avait acquis pour ses élèves longeait la voie ferrée. Du haut de la tribune empanachée, au cours de son speech de clôture, il apostropha la locomotive qui passait silhouettant les devoirs de la jeunesse envers le progrès et les lycéens qui l’écoutaient furent transportés d’enthousiasme par cet éloquent modernisme !… C’étaient là pour les sports scolaires de précieuses amitiés.

Quelques vides se dessinaient parmi nous. Plusieurs de nos « élèves » partaient, devenus hommes, pour servir au loin la patrie. Et comment ne pas saluer ici la mémoire de ceux qui ne sont plus, de Paul Blanchet, d’Adrien Pauly dont la terre d’Afrique