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l’art dans l’éducation

recevoir le baptême. Le beau, ainsi révélé, lui sera-t-il d’un puissant secours dans la montée vers le bien ? On ne doit pas trop y compter. Cette question de la vertu moralisatrice de l’art est en litige depuis longtemps et sa solution serait plus aisée, si on avait soin de définir d’abord le genre de moralisation que l’on a en vue, en la posant. L’art éclaire l’intelligence, captive la pensée, incite l’ambition : ce sont là des résultats moraux suffisamment précieux, mais la morale proprement dite n’en profite guère. Le caractère n’en est point fortifié, la conscience n’en devient pas plus solide, ni la résistance au mal plus fréquente. Le Bien, le Beau et le Vrai forment une trinité laïque que le monde moderne a trop de tendances à assimiler à la trinité théologique, dont les trois personnes composent un seul Dieu. Ici l’unité est fictive ; chacun des termes ne renferme pas les deux autres. La notion du Beau, notamment, peut être indépendante de la notion du Bien et de celle du Vrai. Le Beau idéal tend à se confondre avec le Bien et le Vrai ; mais le Beau relatif, tel que l’humanité le crée et le contemple, n’est ni toujours bien ni toujours vrai. Seulement, en un temps où l’homme est poussé par l’organisation sociale à multiplier les entorses à